Phénomènes perturbants liés au fonctionnement de l’hélice de propulsion d’un bateau.

 

Cet article est rédigé par Jacques Gély qui a été Directeur Technique de la Société Seenergie, spécialisée dans la marinisation des moteurs Peugeot.  Banik navigue depuis 1989 avec le même moteur ( qui a 4000 heures en 2011) est qui avait été préparé par Seenergie.
Nous n'avons pas d'article sur la mécanique en général. Peut-être que Jacques nous fera part de son énorme expérience avec le développement d'autres thèmes...

Aujourd'hui il nous parle des Phénomènes perturbants liés au fonctionnement de l’hélice de propulsion d’un bateau.

Jacque Gély à bord de son "Bleu Citron"

 

 

 

Il y a quelque temps, j’ai été sollicité  pour contrôler le réalignement d’un moteur, cause supposée de fortes vibrations de fonctionnement.  Il s’agissait d’une coque en V, 3 tonnes environs équipée d’un moteur de 300 cv en propulsion ligne d’arbre. Le bateau est neuf, un an, il a une cinquantaine d’heures de fonctionnement, le propriétaire recherche un meilleur confort d’utilisation, ce n’est pas peu dire, un professionnel a  déjà procédé au réalignement du moteur.

Lors des essais il est facile de constater que la partie arrière du bateau, au voisinage de l’hélice subie de fortes vibrations se répercutant sur l’ensemble du bateau, amplifiées par endroit par un planché ou une étagère non fixées……..

Le contrôle d’alignement laisse apparaître que de ce coté tout est normal……part contre une photo de l’étambot montre que ce dernier a un profile large devant l’hélice très proche…..

 

Tachons de trouver une explication :

Chaque pales d'hélice en tournant doit propulser l'eau vers l'arrière du bateau, ce phénomène se produit à priori de manière uniforme pour autant que l'eau poussée par la pale soit :

 

1        En amont de l’hélice, remplacée par autant de liquide qui vient d'être déplacé. Ce n'est généralement pas  le cas. L'écoulement de l'eau le long de la coque en amont de l'hélice est toujours perturbé, et de ce fait, la pale d'hélice passant, par exemple devant l'étambot, va trouver un« trou d'eau» d’autant plus important que l’hélice est proche de l’étambot (ou proche d’un autre appendice quelconque de la coque) (C’est pour cette raison que les podes de propulsion ont l'hélice en avant)

 Il résulte que la pale, durant sa rotation, à chaque tour, va suivre un cycle de fonctionnement saccadé,  composé sur un tour, de secteur de rotation propulsif suivit d’un autre secteur  faiblement  ou pas du tout propulsif.

 L’importance de ces alternances va dépendre de la force appliquée sur la pale (puissance propulsive qui augmente avec la vitesse du bateau) et de l’importance des trous d‘eau (on peut imaginer que la perturbation de l’écoulement des fluides ne pourra qu’augmenter avec la vitesse du bateau)

 Après chaque trou d’eau, la pale vient ainsi à nouveau frapper plus ou moins violement le volume d’eau qu’elle doit déplacer. Ces chocs provoquent suivant leurs importances des bruits et vibrations qui se transmettent à la coque. Ces chocs et vibrations naissent du faîte que, lorsque la pale est propulsive, sous l’effort, a tendance à fléchir ou se déformer vers l’avant. A l’inverse lorsque la pale n’est plus propulsive dans les trous d’eau, elle revient à sa position initiale (on peut donc imaginer que l’extrémité de la pale va subir, tout en tournant, un très léger mouvement avant/arrière/avant/……) par rapport à son moyeu.

De part sa construction, l’hélice est parfaitement rigide et ne se déforme pas. Par contre elle transmet ces efforts à l’arbre d’hélice qui lui, compte tenu de sa longueur et malgré sa proportionnalité calculé par rapport à la puissance à transmettre, peut être flexible et se déformer légèrement si le phénomène se crée.

(Un professionnel pourra facilement déterminer les caractéristiques d’un arbre d’hélice, tandis que le phénomène naissant de l’écoulement des fluides, qui peut varier d’un type de coque à une autre, ne se constate que lors d’essais. Il est donc prudent,  en construction, si l’on a des doutes et si l’on ne peut effectuer d’essais prototype, de sur dimensionner le diamètre de l’arbre d’hélice)

 

 

Ce phénomène se complique si l’on considère le nombre de pales de l’hélice : chaque pale va appliquer à l'arbre durant un tour, les effets décrit ci-dessus, et,  pour une hélice à trois pales, l’arbre va subir trois  fois par tour, une flexion de déformation, puis par élasticité trois retour à sa position normale.

Voyons ce qui se passe (simplement) si l’on considère la vitesse de rotation de l’hélice dans chacun des cas :

-          Lorsque l’arbre se déforme sous l’action « pale propulsive » : à chaque plage de régime de rotation de l’hélice correspondra une fréquence  du phénomène de déformation. Cette fréquence augmente avec le régime de rotation, ou, lorsque le régime augmente, le temps diminue entre chaque phase propulsive. 

-          Lorsque l’arbre reprend sa forme initiale, « la pale passe dans le trou d’eau » : Ce retour à sa forme initiale dépend des caractéristiques d'élasticité de la matière dont la fréquence est constante : le temps ne varie pas entre chaque phase de retour à la position initiale de l’arbre.

 

-          Il  résulte de ces deux considérations qu'il est possible qu'à certains régimes de rotation les fréquences se croisent et qu'à l'effet de la pale qui provoque une légère déformation de l'arbre s'en additionne une autre avant que l'arbre ait pu retrouver sa forme initiale (troupe qui traverse un pont en marchant au pas cadencé) Ce cas extrême peut provoquer de fortes vibrations de l’arrière du bateau.

Conséquences : inconfort, fatigue des organes de propulsion (bague hydraulube) et de la coque qui doit contenir (si elle est suffisamment rigide) ou répercuter  les efforts perturbants sur l’ensemble du bateau.

Action à mener : éliminer la cause à la source : le trou d’eau ; difficile à obtenir car cela touche à la conception du bateau.  Une amélioration  peut être possible en éloignant l’hélice de l’étambot ou d’appendices perturbants ou en améliorant l’écoulement de l’eau autour de l’étambot : affinage de sa largeur : gros travail à mener avec l’architecte ou un professionnel expérimenté.

Autre possibilité :

- Choisir une matière plus dure (tous les fabriquant d’arbre d’hélice en proposent)

- Augmenter son diamètre (il est quelque fois possible de gagner 5 mm sur le diamètre de l’arbre sans changer le tube étambot mais avec une bague hydraulube adaptée)

-  Ajouter un palier flottant à l’intérieur du bateau si la place est suffisante. Le palier flottant  permet à l’arbre de pouvoir coulisser légèrement d’avant en arrière sous l’effet de la poussée de l’hélice : placer entre l’arbre et le roulement une bague en téflon a partir d’un palier industriel oscillant.

Types de coques concernées : bateau de plaisance à déplacement, semi planant et planant par propulsion en ligne d’arbre ou V drive.

Pour les propulsions en sail drive, Z drive ou Stern drive, l’hélice est généralement pas sujettes à ce phénomène: l’arbre d’hélice  très court  et parfaitement guidé ne se déforme pas.

Autres cas ou le phénomène peut apparaître :

-          Lorsque l’on modifie les caractéristiques de l’hélice sur une propulsion déjà en place, en augmentant le diamètre de l’hélice ou le pas, on augmente légèrement le couple à transmettre à un régime donné et, si le phénomène était auparavant naissant, il peut devenir  plus perceptible.

-          Lorsque l’on augmente le rapport de réduction pour une même ligne d’arbre et avec modification de l’hélice, on augmente le couple à transmettre et donc l’effort sur l’arbre.

-          Lorsque l’hélice est déformée par un choc.

Conseils lorsque l’on intervient sur le système de propulsion d’un bateau : conserver les caractéristiques originelles : puissance moteur, rapport de réduction, longueur, diamètre et caractéristique de la matière de l’arbre, caractéristiques de l’hélice et son positionnement.

Nota : un défaut d'alignement du moteur peut provoquer le même phénomène, car il engendre aussi une déformation de l'arbre.

 

2          En aval de l’hélice, évacuée vers l’arrière sans perturbations, seul le gouvernail est présent.

Le flux d’eau propulsé par l’hélice, comme vu ci-dessus n’est pas régulier, de plus il subit, par le fait de la rotation de l’hélice, un déplacement vers l’arrière non pas dans l’axe du bateau mais légèrement dévié, ce qui a pour conséquence de faire tourner le bateau (propulsion droite, le bateau tourne vers la gauche) De part ces deux phénomènes et lorsque le gouvernail est important et ou en porte a faux (non tenu en partie inférieure, seul le tube de jaumière maintien l’effort) le gouvernail peut subir un mouvement oscillant important se transmettant à la coque.

 

Comment analyser le problème ? Lorsque le phénomène se produit, à l’intérieur de la coque, placer les mains à plat autour de l’étambot, de la chaise, du tube de  jaumière ou du moteur en les déplaçant par glissement. Vous finirez par sentir les vibrations et petits chocs et en retrouver l’origine par un niveau croissant ou décroissant de perception.

 

Jacques Gély

 

 

 


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Une hélice bien adaptée et correctement installée est indispensable pour la bonne propulsion du navire.

 

 

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