Les génois sur enrouleurs:

Banik est équipé depuis 1993 de deux génois sur enrouleurs. A l'époque c'était une configuration qui était assez rare hormis sur quelques voiliers de course au large en équipage réduit. Mais le système est tellement bien adapté à la croisière hauturière que nous ne pouvons manquer de l'expliquer ci dessous. Aujourd'hui nous maintenons sans hésitation cette option.

 

Que reproche t-on en général à un génois sur enrouleur.?

Première critique, la fragilité du système:

J'ai longtemps été contre les enrouleurs à cause de ça. Je n'ai jamais voulu gréer notre premier Banik autrement qu'en cotre avec de bons focs à mousquetons. Nous avions  eu l'occasion de donner un coup de main à un équipage désemparé dans les Bouches de Bonifacio lors d'une brusque montée du vent qui coucha leur voilier. Il ne leur était plus possible d'enrouler le génois donc de réduire la toile... C'était en 1982, les choses ont bien changé maintenant.

Deuxième critique, la forme de la voile:

Avec un enrouleur on n'a jamais de belles voiles: Si on veut un peu de creux dans un génois léger, cela fait des plis catastrophiques quand on enroule... La performance au près s'en ressent. Si on veut une voile de gros temps bien raide, elle ne se gonfle pas dans les petits airs... On est obligé d'avoir plusieurs génois et on doit hisser au port, avant de partir, celui (le génois lourd ou le léger) que l'on pense le mieux adapté au moment. Cela ne fait donc même pas faire des économies de garde robe... Si on n'a qu'un génois (forcément médium) ou si on fait le mauvais choix, la voile qui est amenée à supporter un vent pour lequel elle n'a pas été faite, sera rapidement défoncée...
Quand à aller changer, à l'avant, un génois par un autre, c'est perdre tout l'intérêt du système et ça augmente les risques car il faudra dérouler la voile en entier pour pouvoir l'affaler (alors que probablement, cela fait longtemps que le temps ne permet plus de porter la toile en entier puisqu'on l'avait roulée).

 

Tout ça est vrai mais:

1)     Depuis de nombreuses années les enrouleurs sont fiables. Avec du matériel de qualité, l'argument fragilité ne tient plus. D'autant plus que lorsque vous équipez un voilier pour la haute mer, il ne faut pas être à quelques euros près... Prenez une bonne marque et surtout une pointure d'enrouleur au dessus de ce qui est préconisé par le constructeur. Vous n'aurez jamais de problèmes.

2)     Nous ne sommes pas sur des bateaux de course mais sur des voiliers de croisière ou la sécurité prime sur la performance... La facilité des manœuvres est importante aussi car nous naviguons en équipage réduit et tout ce qui peut contribuer à éviter des fatigues inutiles est bien venu. Le gain en sécurité est incontestable quand on peut rester dans le cockpit pour diminuer la voilure au lieu de se traîner vers le pont avant en tirant un gros sac qui ne demande qu'à passer à l'eau. La facilité de manœuvre est incomparable quand on a du bon matériel et que l'on maîtrise les gestes. Le seul piège est sans doute que l'on anticipe moins avec un enrouleur. C'est tellement facile et rapide que l'on risque plus de se faire surprendre en attendant la dernière minute. Alors qu'un changement de foc pendant que ça brassouille c'est tellement plus compliqué, que le bon marin l'effectuera de préférence avant que le grain noir qui est au loin, ne lui arrive dessus.

 

La solution adopté sur Banik depuis 1993 est d'installer deux génois sur enrouleurs pour avoir les avantages du système tout en minimisant les inconvénients décrits ci-dessus:

Voici le pourquoi et le comment des choses.

 

Sur le premier enrouleur on envoie un génois léger. Le deuxième enrouleur est installé derrière le premier et porte un génois lourd.

Lorsque nous sommes au près:

Imaginons qu'il y a du petit temps, nous avons besoin de puissance pour déplacer notre lourde coque en acier. Nous déroulons alors, en grand, le génois léger, coupé comme un génois léger, avec le creux qu'il faut, placé au bon endroit pour que la voile génère le maximum d'énergie. La voile reste toujours belle et efficace car à partir de force 3 nous l'enroulons complètement pour dérouler en grand, à sa place,  le deuxième génois. Celui ci est forcément un peu plus petit que l'autre puisqu'il est situé derrière mais cela n'a pas d'importance car lorsqu'on le déroule au près c'est parce qu'il y a plus de vent. Il est fait de toile plus épaisse, il est bien plat et il est renforcé pour tenir tous les temps. Si le vent continue de monter, c'est ce génois que l'on roule progressivement jusqu'à ce qu'il joue le rôle de tourmentin. Les plis sont minimums et la voile ne se défonce pas car elle est taillée plate et faite d'un tissus épais.
Lors des virements de bords sous génois léger, il est nécessaire d'enrouler la voile à moitié pour faciliter son passage entre les deux étais. C'est une manœuvre que l'on a appris à faire dans le mouvement du virement. Pendant que la voile faseye, on lâche l'écoute, on brasse à la volée le cordage qui sert à enrouler (pas plus de la moitié de la longueur) puis on va border la contre écoute pendant que la voile se redéroule. C'est un peu plus de boulot c'est vrai, mais je rappelle que cela se fait par petit temps et que l'on utilise même pas les winchs (sauf pour l'étarquage final). Si on est amené à tirer des bords dans un chenal étroit, on déroule le génois lourd ou on démarre le moteur...

Au portant c'est carrément le rêve:

C'est dans les longues tirées de plusieurs jours ou semaines au portant, poussé par l'alizé, que l'on prend un rythme de croisière qui n'incite pas à faire trop de manœuvres...

Dans l'alizé il y a cependant deux types de manœuvre qui reviennent souvent: L'empannage et la réduction de voilure.
L'empannage car l'alizé, en Atlantique Nord, passe régulièrement du NE au SE en nous obligeant à changer d'amure... L'empannage c'est pas marrant quand c'est le 5ème de la journée et qu'il faut inverser bomes et tangons avec toutes les écoutes et retenues de sécurité...
La réduction de voilure (ou inversement renvoyer de la toile): L'alizé ne souffle pas toujours à la même force, le matin et l'après midi,  le jour et la nuit... et puis il y a les grains qui peuvent générer de violentes bourrasques passagères...

Au grand largue ou au vent arrière, il n'y a plus de problèmes de plis qui gênent les performances ou de voiles qui se défoncent sous les centaines de kilos de traction d'une écoute bordée à mort... Au portant on a besoin d'un bateau facile à équilibrer,  stable sur sa route. Il est bien connu que deux focs en ciseaux, bridés sur deux tangons, tirent le voilier par le nez en réduisant les efforts nécessaires au pilote ou au régulateur d'allure.

Imaginons:   Nous voici donc, par exemple, au grand largue, tribord amure, avec nos deux génois en ciseaux. Le vent apparent est de force 4. Le génois sous le vent (peu importe le lourd ou le léger) est déroulé en grand. Le génois au vent est un peu enroulé car le tangon est avancé vers l'avant.  

Le vent tourne un peu et passe sur l'arrière: Il suffit de dérouler le génois de tribord tout en reculant son tangon. Si le vent vient  pile sur l'arrière les deux génois sont réglés de la même façon: même position des tangons et même surface. Si le vent forcit un peu: On enroule un peu les deux génois... Le vent forcit plus: on enroule plus... Si le vent passe sur l'autre bord: on avance le tangon bâbord en enroulant un peu de génois si nécessaire, et on déroule à tribord pour équilibrer... C'est génial: tout cela se fait du cockpit, en toute sécurité, juste en tirant sur des bouts de ficelles...
La grand voile, quand à elle peut  rester ferlée sur la bome, avec son taud de protection dessus, durant toute la traversée de l'océan.

 

Pour mettre en œuvre tout cela, il faut un peu d'équipement, mais ensuite c'est tellement simple que nous n'avons plus le courage d'envoyer le spi qui est pourtant équipé d'une chaussette.
Lors de notre dernier voyage, celui ci n'a été hissé que pour jouer à spi vole au mouillage, ce qui a permis de l'aérer un peu...
Il faut reconnaître cependant que par tout petit temps, le spi est plus efficace que les génois en ciseau. Il est plus grand et plus léger. ...Mais dès que le vent vent monte d'un cran, le système des génois est plus sécurisant et on contrôle l'évolution du temps plus facilement.

 

Voir les détails de l'installation:   

 

JBbome.jpg (38918 octets)   Au portant c'est carrément le rêve

 

 

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